A mon frère pour ses trente ans (24 février 1959)

Si je t’apporte à boire ô ! mon auguste frère

Ce n’est pas pour sauver l’honneur de ton père

Je le sais fort capable malgré son âge grand

De le faire tout seul en rouge ou bien en blanc

Mais c’est surtout, vois-tu, hélas pour te prouver,

Qu’entrer dans la trentaine va certes t’éprouver.

 

Oui je sais, sur la terre presque tout va par trois

Qu’il y eut trois rois mages, du cognac trois étoiles

Que c’est la trinité que prient les femmes en voiles

Et même qu’ainsi tournent les vieux chevaux de bois.

 

Tout cela c’est très vrai et certes je le sais

Cela n’est pas très grave, en tout cas pas assez

Pour faire peur à un gars d’un mètre quatre-vingt

Né dans un beau pays où mûrit le raisin.

 

Mais ce qui corse toutes ces viles fadaises

C’est une petite chose qui crée un grand malaise

Un tout petit calcul, une simple opération

Qu’un langage écolier nomme multiplication.

 

Trente c’est trois dizaines et certes c’est peu dix !

Tandis que trois fois plus oui, font quatre vint dix

Dix de plus que ta taille et cela est très grave

Car vois-tu les années personne ne les lave !

 

Tous les arrosages n’y pourront certes rien

Mais arrosons quand même après nous verrons bien.

 

Marcel Geffroy

20 Novembre 1915

12 Mars 2002