La vie à Auxerre Vauban



Des alsaciens (des braves s'il en fut) et des limougeauds épatants -chacun parlant son patois, bien sûr, mais quelle ambiance !!

Je pense que les quelques mois de début 1937 furent les moins mauvais de mon séjour à l'armée.

Je fus nommé caporal, bien sûr ! Je suis sans doute un des rares gradés de mon régiment à être toujours resté à ce grade ! Tous mes amis ont fini sous-off ; il est vrai que je n'ai jamais été cassé non plus !

Le régiment, ou plutôt la vie militaire, a un côté agréable : la panoplie d'individus rencontrés, depuis l’illettré jusqu'au licencié, tout le monde se côtoie, se tutoie, est camarade !

Bien sûr, il y a la différence de moyens financiers et les affinités vont surtout de ce côté. Mais je l'ai dit ailleurs, je suis assez peu liant et quelques amis me suffisent. Et puis, étant assez près de mon pays, j'avais moins la nécessité d'avoir des amitiés prolongées. Lorsque le peloton fut terminé, nous nous dispersâmes au hasard des nominations et n’eûmes l'un avec l'autre que d’épisodiques rencontres et puis d'autres évoluèrent vers les grades supérieurs.

J'avais pourtant bien débuté puisqu’aussi bien je finis 3ème de l'examen final, seulement voilà : il y eut un petit ennui. Nous avions convenu de fêter la fin du stage par un petit repas en commun dans un petit restaurant. En conséquence, nous avions sollicité des permissions de manière à avoir le temps de voir venir ! Pour une raison obscure, un sous-off de carrière me sucra la mienne et celle d'un alsacien nommé Guth ; nous rentrâmes à l'heure dite mais fîmes le mur le jour sitôt après l'appel afin de rejoindre les autres ! La «vache» fit faire un contre-appel où, bien entendu, nous fûmes portés absents !! Un élève gradé qui fait le mur le jour de l'examen, quelle honte !!!

Pire encore : on s'aperçut que j'avais eu, à mon précédent corps, 8 jours de taule dont le sursis finissait la veille !! Je n'eus pas de punition officielle ; je fus rétrogradé, on falsifia mes notes et le tour fut joué !!

Je fus nommé quand même, mais ma carrière militaire était jouée. A vrai dire, je m'en foutais éperdument, n'ayant justement en aucune façon envie de faire «carrière» !!!

L'avenir devait me prouver mon erreur ! 

Marcel Geffroy

20 Novembre 1915

12 Mars 2002