Introduction écrite par mon cousin Alain au contenu de ce cahier

 

Malgré les deux dates qui y figurent, il est difficile de situer les poèmes de ce cahier où Marcel a recopié « au propre » ses poèmes d’adolescent ou de tout jeune adulte.

 

« Préface », daté du 22 juillet 1938 (il a 23 ans) ouvre le recueil alors que « Anniversaire », du 3 mars 1937, est rejeté à la fin.

 

Ce cahier est une sorte de « fourre-tout » où ses propres poèmes se mêlent aux chansons à la mode du temps qu’il y a recopiées, aux blagues qui l’avaient amusé, aux histoires drôles de Saint-Gilles ou de Trébord qu’il a mises en vers. On y trouve même plusieurs pages consacrées à « l’art de tirer les cartes » pour dire la bonne aventure…

 

Il n’a pas détruit ce cahier ; il ne l’a pas montré non plus. Modestie fausse ou simplement fidélité à sa jeunesse et à ses espérances d’alors déjà teintées d’amertume ? Au lecteur d’aujourd’hui de se faire son opinion à la lecture de ces poèmes, certes maladroits techniquement, mais qui témoignent déjà d’un goût affirmé pour la poésie et la lecture, pour la culture et les études que le jeune apprenti boulanger n’a pas eu la chance d’approcher autant qu’il l’aurait voulu en ces temps de menaces mondiales.

 

Les poèmes déjà publiés sur ce site témoignent de la progression rapide du style et de la maîtrise qui manque à ces premiers vers dont la fraîcheur fait tout le charme même si on sent déjà poindre, à partir de la conclusion du Christ de Gonfle-Bourrique, un ton plus grave et plus polémique aussi : La Vérité, Le Régiment, L’Monde, Les élections, Le Modernisme, Plaisir d’un monde : vivre, La guerre dans lesquels se dessine sa vision d’un monde imparfait et d’une humanité décevante.

 

Finalement, le contenu et l’esprit de ce cahier sont parfaitement résumés par Marcel lui-même dans sa Préface : « Je ne suis pas un poète […] Les histoires qui sont inscrites, Seules en vers je les ai tournées […] Si j’ai commis quelques erreurs, […] Je n’ai fait cela que pour moi […] Et si un jour on vous demande, Connaissez-vous l’auteur de cela, D’avance je vous recommande De dire je n’en sais rien ». Plus tard, il écrira la même chose dans « Geffroy je suis » où s’exprime plus fortement encore une identité consciente de ses défauts et qualités mais fier de ce qu’il a construit qui s’ébauchait déjà ici dans ces premiers textes. « Je m’en irai tout simplement, conscient d’avoir rempli ma vie ». Simplicité, modestie, discrétion, humanité et nostalgie d’un monde meilleur qu’il sait déjà, lucide adolescent, ne devoir jamais arriver : Geffroy c’était !

 

Marcel Geffroy

20 Novembre 1915

12 Mars 2002