Dieu qu’il est difficile, ami, en ce bas monde
De plaire ou de déplaire à chacun à la ronde.
Dieu qu’il est difficile, aussi hélas de louer
Pour une chose qui pourrait vous être allouée.
Tout cela vois-tu, pour dire en peu de mots
Qu’écrire que tu vieillis équivaudrait ma foi,
A moins que je ne fusse le plus fieffé des sots,
A avouer que je tire aussi vers la vieille noix.
Mais par le même système si je trouve plus charmants
Les hommes à mesure que s’accumulent les ans,
Je serais obligé tout en étant sérieux,
De dire qu’après nous, on n’a rien fait de mieux.
A quoi bon tout cela même si c’était vrai
Je me demande un peu qui donc le croirait.
Pourtant quarante-cinq ans c’est encore le bel âge
C’est celui de la preuve «par neuf» et c’est dommage
Que ce chiffre divisible et par cinq et par trois
Fasse que nos quinze ans soient multipliés par trois.
C’est sous le signe de «quinze» hélas que nous naquîmes,
Et c’est en quarante-cinq aussi que nous vainquîmes.
Mais pour toi seulement si je le multiplie,
Il se trouve qu’en kilos je trouve quatre vingt dix.
Et il faudrait encore ajouter deux enfants
Pour diviser par cinq un chiffre aussi charmant.
Ils étaient aussi, dit-on sous Charles neuf,
Quarante-cinq pour tuer et saigner comme un bœuf,
Un certain Duc de Guise dont les propos narquois
Avaient un certain soir indisposé le roi.
C‘est sur ce propos bien triste, ami, que je te quitte :
Il faut se résigner la vie passe si vite,
C’est à nous de savoir un peu en profiter,
Et c’est là tout le mal que je viens te souhaiter.